… - ohpéra – muet - …

Comment donner au cinéma refuge au « sans image » ?
À l’image latente, oubliée, inconsciente, rêvée.
« Il y a peut-être dans ce film une double fissure, celle d’un cinéma qui ne vit pas que par les images et celle d’une humanité qui cherche une route un peu différente que celle qui nous est donnée. D’ailleurs au fur et à mesure du film on ne fait plus la distinction entre des textes à lire des pancartes muettes et “sans images” et les “images en mouvement” »
Lison Madelpech.

Fait de la réunion de six contes entrecoupés par trois interludes, … - ohpéra – muet - …, est un film muet parlant émergeant d’une expérience où il est question de « places » et « des langues » : celles à abandonner, celles à reprendre, celles à rêver, celles plus sécrètes. Points de suspensions, traits d’union, chaque syllabe du nom de cet ohpéra est le fragment-nom d’un des six contes qui la composent.

Un ohpéra qui ne s’écrit pas comme de coutume, qui se travestit peut-être pour faire place à un « h », cette lettre à la fois aspirée et muette, qui sait marquer sa présence mais dont on entend à peine sa sonorité. Opéra alors, oui peut-être du « h », des « h » diverses, un ohpéra quelque peu bousculé donc par ces présences qui pourraient invoquer de ce que des formes centrales de notre culture n’auraient pas réussi à entendre ou su le faire.

Cela part de montages et de démontages et fait parler le muet de places et lieux de l’Histoire et la langue des conteurs-conteuses pour lesquelles il n’y a souvent pas de place, car singulière.  Démontages comme celui en 2014 de la statue de Cristobal Colón (Christophe Colomb) réalisée par le sculpteur Arnaldo Zocchi et installée depuis 1921 à Buenos Aires derrière la Casa Rosada —la maison du gouvernement argentin— sur la place qui fut appelée depuis « Colón » ; monument central du pays qu’on ne verra peut-être jamais comme dans ce film inachevé !

 Le film a été réalisé avec la complicité du groupe UEINZZ, qui se définie comme une communauté de sans communauté pour une communauté à venir. UEINZZ est une compagnie de théâtre qui propose un territoire scénique pour tout ceux celles qui sentent vaciller le monde. Elle est composée par beaucoup de monde, penseurs, penseuses, philosophes, usagers, usagères de la psychiatrie,  thérapeutes, mais aussi des personnes dans ici et maintenant de chaque expérience et qui se trouvent dans une configuration singulière dans laquelle les rôles supposées de chacun, chacune retrouvent leurs limites, et fluctuent, sont modifiés ou même contestés dans la relation qui se créée dans le groupe.