J-F. Bocle
www.jeanfrancoisbocle.com
Jean-François Boclé est né en 1971 en Martinique où il vécut ses quinze premières années. Il est basé à Paris. Il a suivi une formation à l’ENSBA École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Bourges puis de Paris.
On a vu son travail, entres autres, à la Saatchi Gallery (2015, Londres), à Para Site (2016, Hong Kong), à Raw Material (Dakar), à Bétonsalon Centre d'art et de recherche (2016, réalisations du workshop d'Eva Barois de Caevel, Paris), à Fuego Fuego (2015, San José, Costa Rica), à l'University de Trisaktri (2015, commémoration de la Conférence de Bandung, Indonésie), à la Philharmonique de Paris / Cité de la Musique (2013, Paris), au National Museum of World Culture (2013, Stockholm), au Queens Museum (2012, New York), au KAdE Kunsthal (2012, Hollande), au Royal Museum of Central Africa (2011, Tervuren, Belgique), au Museo de Arte Contemporaneo de Puerto Rico (2011, San Juan), à la Grande Halle de la Villette (2009, Paris), à l'École des Beaux-arts de La Cambre (Bruxelles, 2009), au Museo de Arte Contemporaneo du Panamá (2009), au BildMuseet (2008, solo show dans les 1000 m2 du musée, Umeå, Suède), au FRAC Champagne-Ardenne (2006), ou encore au Centre d'Art Contemporain Le Parvis (2005, Ibos).
Jean-François Boclé participe régulièrement à des Biennales internationales comme la Biennale de Colombo (2016, Sri Lanka), la Biennale de Dakar (2016, Sénégal, commissariats invités), la Bienal 43 Salón (inter)Nacional de Artistas (2013, Medellín, Colombie), la XIème Bienal de la Habana (2012, Cuba), la 1ère Encuentro Bienal di Caribe (2012, Aruba), la 8ème Bienal do Mercosur (2011, Porto Alegre, Brésil), la XXXIème Bienal de Pontevedra (2010, Espagne), la Xème Bienal de la Habana (2009, Cuba), et la 1ère Biennial of Thessaloniki (2007, Grèce).
Il est régulièrement invité à des résidences d'artiste comme en Guadeloupe (2016), à Curacao (2011, IBB), en République de Maurice (2007, Triangle art Trust), en Martinique (2006, Drac et Académie Martinique), en Colombie (2005, Mapa Teatro/Laboratorio de Artistas, Bogotá), ou en Italie (2005, IFF-Palazzo Lenzi, Florence).
En 2010, il est présent en Solo Project à Art Brussels Art Faire (Belgique), ou dans des Foires comme (e)merge (2014, Washington, USA), Volta Basel (2014, Suisse), Volta NY (2014, USA), Context Art Miami (2012, USA), Scope New York (2012, USA), et Art Brussels (2010/2011).
Il est représenté dans des collections comme la Saatchi Collection.
C. Vincent
Mon intervention entendra réfléchir sur le lien particulier qui s’est noué entre les acteurs du domaine de l’art et ceux des études postcoloniales. Mais plutôt que d’analyser les usages et les instrumentations des théories postcoloniales dans les pratiques artistiques, je proposerai d’inverser les termes de la relation en me demandant si l’univers artistique n’a pas été aussi un catalyseur pour les postcolonial studies, en illustrant les concepts à coups d’expositions et en se faisant un support de vulgarisation. Mon propos se voudra avant tout exploratoire du passage de la question « qu’est ce que les postcolonial studies ont fait à l’art ? » à « qu’est ce que l’art a fait aux postcolonial studies ? ».
La fortune des thèmes et des mots-clés issus des postcolonial studies dans l’art n’est plus à prouver. Les concepts de « translation » et de « third space » d’Homi Bhabha, de « diaspora » de Paul Gilroy, de « tout-monde » et de « poétique de la relation » d’Edouard Glissant ont été usés plus par leur force de suggestion que par leur pertinence théorique, pouvant projeter un monde dans lequel les tendances homogénéisantes sont éliminées. Hou Hanru a fait de Modernity at Large: Cultural Dimensions of Globalization (1996) d’Arjun Appadurai un de ses livres de chevet. Il y puisa son inspiration et appliquait ses concepts dans ses expositions, visiblement fasciné par le monde en mouvement et de flux décrit par l’anthropologue - Hou Hanru qui pouvait affirmer lors du vernissage de Cities on the Move au CAPC (Bordeaux) en 1998, que « le commissaire est la figure type de l’homme global ». On pourrait aussi aborder la notion d’ « altermodern » introduite par Nicolas Bourriaud mais dont l’auteur semble édulcorer de ce qu’elle est plongée par avance dans le bain postcolonial à travers la notion de « modernités alternatives ». L’imprégnation de ces théories est telle dans le discours de l’art contemporain qu’il faudrait se demander jusqu’à quel point les curateurs — puisqu’il faut les identifier comme les principaux introducteurs de ces théories critiques — n’ont pas formaté leur artscape à partir d’elles plutôt que de s’en être servis en simple support théorique.
Par ailleurs la présence des théoriciens de la globalisation et des postcolonial studies ne s’est pas réduite aux notes de bas de page des essais et aux notes d’intention des commissaires et des théoriciens de l’art. Les programmes discursifs accompagnant les expositions et les pages des revues spécialisées et des catalogues se sont ouvertes largement aux penseurs postcoloniaux. Par exemple, les premiers articles d’Homi Bhabha sont publiés dans October et Artforum. Il a été traduit en français pour la première fois en 1989 dans le catalogue de Magiciens de la terre – exposition contre laquelle s’est pourtant développée la tendance postcolonialiste dans l’art. On n’a sans doute pas encore mesuré à quel point la médiation de ces théories par les infrastructures de l’art a joué dans leur popularisation, et tout l’objet de ma communication sera de tenter de le montrer.
Cédric Vincent est docteur en anthropologie, il est postdoctorant au centre d’Anthropologie de l’écriture (iiAC/EHESS) où il codirige le projet « Archive des festivals panafricains » avec le soutien de la Fondation de France.
Son travail a fait l'objet de publications dans des revues (art press, art21, Parachute, Springerin, Sarai Reader...) et des catalogues (Africa Remix, Indian Summer, Raqs Media Collective, Conspire!). Il prépare avec Dominique Malaquais une série de DVDs de films expérimentaux d'Afrique (ed. Lowave).
E. Nabeyrat
XXIVe Biennale de São Paulo ou l'anthropophagie comme lieu d'absorption du sujet ethnographique
La revue britannique Afterall a récemment consacré un ouvrage dans sa collection Exhibition Histories series, élevant ainsi la XXIV Biennale de São Paulo au panthéon des expositions historiques. Inaugurée en 1998, elle fut empreinte d'une forte position curatoriale car, jamais une exposition d'une telle envergure, n'avait été consacrée au sujet anthropophage. La 24ème biennale fut donc le principal déclencheur d'une importante mise en circulation du thème de l'anthropophagie. Et avec elle, c'est toute une réflexion sur les principes mêmes qui fut entamée : Appropriation, échange, distribution... à l'heure ou le curatorial s'accompagne d'une émergente évaluation de la curation comme système d'infiltration à d'autres modèles, une révision de la Biennale sur la culture anthropophage s'impose. Véritable entreprise de reformulation d'une histoire de l'art critiquée pour sa vision trop occidentalo-centrée, l'édition de cette biennale s'affirmait comme un modèle d'exposition inédit portant, dans cette perspective, le chantier en Amérique latine d'une réflexion sur le post-colonialisme. Pour autant, le point de friction qui s'opère habituellement à l'intérieur de ces questions se traduisait en réalité ici par un point d'absorption. En quelques mots, la rhétorique postcoloniale se trouvait subtilement recalibrée pour mettre à l'ouvrage les notions d'échanges et pour rendre visibles les espaces de partages pouvant se dessiner dans la relation colonisateur - colonisé.
Estelle Nabeyrat est commissaire d'exposition et critique d'art indépendante.
Elle est diplômée d'un Master de l'Ehess et de l'Ecole du Magasin. Elle a réalisé plus d'une vingtaine de projets curatoriaux principalement en France (la box, Bourges (programme 2006-07) ; Astérides, Marseille ; Palais de Tokyo, Espace Khiasma, galerie Joseph Tang, galerie Emmanuel Hervé...), en Allemagne (Ferderkiel Stiftung Leipzig, Neuer Aachner Kunstverein), aux Etats-Unies (Dallascontemporary, Scaramouche gallery New-york), aux Pays-bas (Rongwrong, Amsterdam) et au Brésil (Museu Da Republica, Rio de Janeiro).
Ses textes ont été publiés dans les revues L'art même (be), Code magazine, Kaleidoscope (it), Komplot (be), Recibo (br), Zérodeux (fr), et les catalogues Dynasty (Musée d'art moderne), Premières (Cac Meymac)...
Elle a participé aux résidences du Pavillon au Palais de Tokyo (2010-11), Capacete Rio de Janeiro (2011) et a bénéficié de la bourse du Museum of Fine-art Houston-Brown Fellowship (2009) et de l'allocation du Cnap (2012) pour ses projets et travaux de recherche sur le re-enactment d'événements historiques et l'anthropophagie.
Elle a été responsable des relations internationales puis coordinatrice pédagogique dans plusieurs établissements d'enseignements artistiques : Akademie der Bildende Kunst, Wien (2003), Ecole Nationale des beaux-arts de Lyon (2003-2008), Esad Reims (2010), Ecole du Magasin, Cnac le Magasin (2014-15).
Pour l'association CEA, elle a récemment co-édité avec Damien Airault "Réalités du commissariat d'exposition" (Ensba-Paris/Cnap) parut en 2015.
O. Vayron
Percevoir, classifier et présenter l’autre : quand les collections scientifiques et les oeuvres d’art du muséum de Paris participent de l’ethnographie
A l’inauguration de la galerie d’anthropologie au Jardin des Plantes de Paris en 1898, les nouvelles salles du Muséum dévoilèrent des collections surprenantes. Aux pièces ostéologiques exposées dans les armoires vitrées, s’adjoignaient des photographies, des masques et des têtes moulées sur nature, mais aussi des œuvres relevant de l’administration des beaux-arts. On y trouvait des bustes de Cordier représentant les « races européennes et sémitiques », des dessins, des gravures, des aquarelles et des peintures de Durand, Longa, Werner ou Lefébure. Ces œuvres renseignaient sur les modes de vie, les coutumes, les mœurs des divers types humains exposés. Quelques unes d’entre elles, « rapportées de missions » – souvent de pays colonisés – étaient considérées comme des documents aussi précieux et utiles que les collections scientifiques avec lesquelles elles cohabitaient.
L’installation de ces collections et la conception de l’espace muséal qui leur était dédié est principalement l’œuvre d’Ernest Hamy, titulaire de la chaire d’anthropologie du Muséum. L’exposition des collections d’anthropologie faisait alors partie d’un programme muséographique conçu de pair avec les professeurs d’anatomie comparée et de paléontologie. Cet ensemble constituait un grand tableau synoptique de la vie aboutissant, en fin de parcours, à la «race blanche» occidentale. Issue du regard européanocentré propre au xixe siècle, la trame de cette exposition s’appuyait sur un examen excluant et discursif de l’homme moderne.
Les pièces artistiques, comme les bustes ou les peintures, informaient de manière attrayante ; ces outils didactiques venaient au secours des collections scientifiques, donnant vie aux théories progressistes et diffusionnistes du professeur d’anthropologie du Muséum. Reléguées depuis quelques décennies dans les réserves, les plus belles pièces de l’ancienne collection de la chaire d’anthropologie sont réapparues en octobre dernier lors de la réouverture du nouveau Musée de l’Homme. La priorité scénographique est donnée à la valeur et à l’effet esthétique des œuvres exposées. Leur présentation excluant tout caractère informatif, contrairement aux visées initiales, cherche aujourd’hui à rasséréner le public sur le regard que la science et nous-mêmes portons sur « l’autre et l’ailleurs ». Les 15 bustes de Charles Cordier et les moulages sur nature, salle sur la phrénologie et l’anthropométrie, « Un être de chair ? Un être de pensée ? Un être de liens ? Un être de parole ? » Musée de l’Homme, Paris, Muséum national d’histoire naturelle, (cliché Carole Rabiller).
Les 15 bustes de Charles Cordier et les moulages sur nature, salle sur la phrénologie et l’anthropométrie, « Un être de chair ? Un être de pensée ? Un être de liens ? Un être de parole ? » Musée de l’Homme, Paris, Muséum national d’histoire naturelle, (cliché Carole Rabiller).
Olivier Vayron réalise après l’obtention d’une licence en histoire de l’art à l’université de Paris IV, Paris-Sorbonne, son master 2 sur la galerie de paléontologie du Muséum national d’histoire naturelle sous la direction de Barthélémy Jobert, Basile Baudez et Thierry Laugée. Doctorant en histoire de l’art contemporain sous la direction de Barthélémy Jobert à l’université Paris IV, il poursuit son travail de master sur le musée d’anatomie comparée et de paléontologie du Jardin des Plantes en l’élargissant dans une approche pluridisciplinaire et transversale à une étude approfondie de l’ancienne muséographie et des collections dispersées ou disparues de l’institution scientifique. Au sein du centre André Chastel, il est associé au programme de recherche PatriNat (Patrimonialisation du savoir naturaliste), sur le grand décor peint de la galerie de minéralogie du Muséum de Paris.
J. Bondaz
Musées postcoloniaux et collections subalternes en Afrique de l’Ouest
En Afrique de l’Ouest, les pratiques de collection et d’exposition d’objets à des fins profanes ont une origine coloniale. Les appels à décoloniser les musées qui ont suivi les Indépendances et l’intérêt plus récent des chercheurs pour les collectionneurs ouest africains ont favorisé des propositions de mises en exposition alternatives et, surtout, des logiques d’appropriation ou de réappropriation des notions de musée, d’ethnographie et d’art. Dans cette communication, il s’agira d’interroger ce mouvement de décolonisation des musées et les limites auquel il s’est trouvé confronté. On insistera notamment sur les enjeux liés à la contemporanéité des collections (dont la question de l’art contemporain ne constitue qu’un aspect), sur les rapports entre culture et religion, qui conduisent à la valorisation de l’une au détriment de l’autre, sur la valorisation du passé qui tend parfois au traditionalisme, ou encore sur la dimension politique des musées ouest africains, notamment lorsqu’ils reproduisent le paradigme ethnique hérité de la période coloniale. Basée sur des données historiques et ethnographiques et centrée sur les cas du Mali, du Niger, du Burkina Faso et du Sénégal, cette communication interrogera ainsi les pratiques de collection et d’exposition en situation postcoloniale et les effets de leur caractère subalterne (ou du caractère hégémonique des modèles muséaux) sur la construction des savoirs historiques ou anthropologiques sur l’art des sociétés extra-occidentales.
Julien Bondaz est ethnologue, maître de conférences en anthropologie à l’université Lyon 2. Il conduit depuis 2005 des enquêtes ethnographiques en Afrique de l’Ouest (Mali, Niger, Burkina Faso et Sénégal), notamment en anthropologie de l’art et de la mise en image. Il poursuit parallèlement des recherches sur l’histoire de l’ethnologie et sur les pratiques de collecte ethnographique, zoologique, entomologique et botanique en Afrique, durant la période coloniale. Il a récemment publié L’Exposition postcoloniale. Musées et zoos en Afrique de l’Ouest (Paris, Harmattan, 2014) et « L’art primitif réapproprié ? Les collectionneurs d’art africain en Afrique de l’Ouest », Cahiers d’anthropologie sociale, n° 12, 2015, pp. 24-48. Il collabore par ailleurs avec plusieurs institutions muséales (musée du quai Branly, musée des Confluences, Musée africain de Lyon, musée départemental Albert Kahn).